L’interview qui tue ! #9 de l’Artiste Jeanne Malysa par Frédéric BleuMalt et Maritza Jaillet !

 Nous voilà de retour, avec une nouvelle Interview qui tue ! Cette fois-ci, les règles ne sont plus les mêmes ! Ce n’est pas un.e, mais bien deux Artistes Indépendant.es, qui se sont chargés, de poser les questions à l’Artiste Jeanne Malysa ! Merci à Maritza Jaillet et Frédéric BleuMalt pour leur investissement !

Je vous invite également, lire ou relire les précédentes, Interview qui tue !

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Mademoiselle H?

Frédéric

  • 1. À quiconque évolue dans la twittosphère littéraire française, ton nom semble familier. Tu es partout ! Si je résume bien : une saga THUATA chez les Editions Livresque en 2019, 3 nouvelles érotiques publiées chez Ex Aequo, 1 roman entre polar et érotisme qui vient tout juste de sortir chez Juno Publishing et d’autres publications en 2017, notamment un texte offert pour l’association Le Refuge. Où comptes-tu t’arrêter ? Ou est-ce que comme nos amis américains, sky is the limit ? Disposerais-tu du don d’ubiquité pour être aussi prolifique ? Nous voulons connaître tous tes secrets !

Le jour où j’arrêterai d’écrire (notez le futur et non le conditionnel), ce sera pour deux raisons, l’une probable, l’autre inéluctable : la sénilité ou la mort. Je ne vous cache pas que je préfère la seconde option, la première me terrifie. Je cesserai d’écrire lorsque mes cendres seront éparpillées sous un mimosa, ça m’ira très bien.

mes oeuvres
Je crois à la métempsychose (une façon de se savoir éternel) et je fais mienne la formule « rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme », bon c’est schématisé parce que Lavoisier le disait autrement et qu’il avait lui-même piqué l’idée à Anaxagore de Clazomènes (ah, tiens, un autre Anaxagore – référence à la saison 2 de Thuata). Parce qu’ainsi, mes cendres iront se dissoudre dans la terre, cheminer vers les racines de l’arbre, et peut-être qu’un jour cet arbre donnera sa vie pour fournir des morceaux de bois, et peut-être que ces morceaux de bois serviront pour des crayons à un auteur nostalgique d’anciennes pratiques d’écriture et peut-être que… bref, vous avez l’image. Pourquoi le mimosa, parce que c’est ma fleur préférée et que c’est un arbre (j’adore les arbres). Je vénère celui de mon jardin, hier encore je le remerciais de m’avoir donné toutes ses graines. Bon. Je m’égare, je crois… Pour ma production prolifique, je vais malheureusement être très terre à terre : je dispose d’un temps libre luxueux, indécent presque. Et surtout, je sais dire « foutez-moi la paix, j’écris ! ». Pour l’anecdote, mes enfants (j’en ai 4, 2 très adultes et les 2 derniers pas loin de quitter la maison) me surnomment « la mère supérieure ». Un comble, moi qui suis viscéralement athée !

  • 2. Tu sembles t’être mise sur le tard à l’écriture. Ou peut-être écrivais-tu depuis des années, mais n’as-tu sauté le pas de la publication que très récemment ? Dis-nous tout ! Comment cela a commencé et quelles sont les choses capables de t’insuffler l’inspiration ?

Non. Je n’ai jamais écrit auparavant. Je n’en avais pas du tout l’envie, contrairement à beaucoup qui le font depuis leur tendre enfance. Ce n’est pas du tout mon cas. Mon premier mari d’anarchiste l’était. Il aurait levé haut son drapeau noir de bonheur devant toutes ces facilités pour s’éditer aujourd’hui. Il avait ça dans le sang et moi je le regardais bleuir des cahiers sans ressentir le besoin d’en faire autant. Il m’a écrit des poèmes magnifiquement érotiques. Peut-être qu’un jour, je les éditerais, je ne sais pas, c’est très intime, mais ils sont tellement beaux…
Alors comment m’est-elle venue, cette putain d’envie d’écrire ? Je vais prendre l’image d’une pulsion électrique. Je ne vois pas mieux. Je ne crois pas au hasard, je suis persuadée que chaque chose vient en son temps. Alors dès que j’ai été touchée par ce chatouillis de coucher un roman, j’ai foncé. J’ai d’abord trouvé ma méthode (sans elle, je ne finirai jamais rien) et puis j’ai puisé dans l’Histoire, dans mon côté fleur bleue (la romance dégoulinante comme dirait notre Maritza Universelle), dans les mythes, les mystères, les mystiques, et aussi autour de moi. Je suis assez observatrice et comme je suis une taiseuse, j’écoute, j’apprends, je prends.

  • 3. Sur ton fil twitter, on peut voir un tweet épinglé qui peut faire sourire : cette mise en garde à des messieurs très entreprenants sur la toile…

     

    Penses-tu que ce soit l’apanage de tous les auteurs œuvrant dans l’érotisme que de recevoir des propositions et peut-être un peu plus ? Penses-tu que ce genre soit particulièrement mal vu ou mal compris ? Tes lecteurs ont-ils tort de t’imaginer dans des déshabillés de soie vaporeux en train de manier délicatement des objets faits cuir et de plumes ? 😉 Dans tous les cas, j’aimerais que tu nous parles de ce qui t’attire dans ce genre et de ta façon d’aborder des sujets à priori chauds avec l’insolence respectueuse et la provocation pudique que tu revendiques… Dois-tu ce goût à ton appartenance au signe du Scorpion ou est-ce une sublimation de tes pulsions inconscientes ? Les deux ? Et surtout, qu’est pour toi une bonne œuvre érotique ?

Certains jouets sont en caoutchouc aussi, mais bon, parfois ils ont l’odeur des poupées que j’habillais et déshabillais petite, ça casse un peu l’ambiance. Quant à ma tenue quand j’écris, je suis un poil frileuse, il faudrait un bon 40° pour que je me mette à nu. Mais, pour vous donner un aperçu, je ne m’engonce pas dans un carcan ni un corset.
Il est vrai que déclarer haut et fort écrire de l’érotisme attire toute sorte de faunes. Beaucoup ne cassent pas trois pattes à un canard, et c’est à eux que ce tweet s’adresse, certains (peu) sont une véritable source de plaisir, dans tous les sens du terme.

telephone

Il y a effectivement une forme de retenue encore aujourd’hui, à l’heure de youporn et autres joyeusetés du genre, quant à ce sujet. Comme si c’était honteux et sale d’écrire sur la vulve, les seins, le pénis ou le trou du cul et autres petites merveilles. Des siècles de pudibonderies hypocrites ne s’effacent pas comme ça. Mais la libération est proche, camarade ! C’est d’ailleurs une des raisons pour laquelle j’adore en écrire : je suis une missionnaire (la position en elle-même est banale, je vous l’accorde), une révolutionnaire dans l’âme avec la volonté chevillée au corps de donner un coup de pied dans ce monde de censure et d’interdits.

C’est Fifi la Roukine qui disait lors d’un podcast radio de l’œil du poisson, (bon, d’accord, FishEye) : « il vaut mieux baiser son voisin que de le tuer ». Magnifique !

Et puis l’érotisme est un des meilleurs vecteurs qui soient pour faire tomber les barrières et démontrer que le plaisir (avec amour ou pas, ce n’est pas la question) se décline sous toutes ses formes, sous tous les genres, tous les mélanges et qu’il n’est pas tabou, dès lors qu’il y a consentement mutuel et l’âge requis, cela va de soi.
Le Scorpion (suis née un 10 novembre, notez dans vos calepins s’il vous plait) n’est pas anodin dans l’histoire. Côté mystique, on ne fait pas mieux, mais il n’est pas le seul responsable. Bien sûr que mes pulsions y sont pour beaucoup. J’ai toujours eu cette sensualité en moi qui ne demandait qu’à s’exhiber et comme je suis meilleure à l’écrit qu’à l’oral (enfin, dans certains cas, disons que je ne suis pas mauvaise non plus), les mots m’aident à les exprimer mille fois mieux. Attention, écrire de l’érotisme, c’est un exercice éreintant ! Ce n’est pas si facile que cela et parfois certaines scènes (je visualise toujours ce que j’écris) font que… bon, vous voyez.

Une bonne œuvre érotique, selon moi, est celle qui parvient à faire bander et à mouiller. À faire jouir, au sens propre comme au sens figuré. Avec élégance (et doigté… huhuhuhu).

D’ailleurs, si cela vous tente, j’ai écrit une nouvelle dans le cadre d’un concours (le prix de la nouvelle érotique, coucou David), je ne suis pas dans les finalistes donc je peux faire ce que je veux de ce texte. Venez me voir en DM et je vous l’offre. Le titre est assez révélateur : Le dernier commandement. Il paraît qu’il n’est pas mal…

  • 4. Chacun peut voir que tu diriges depuis peu la section Alcôve (érotique) des éditions Ex Aequo. Comment est-ce arrivé ? Et surtout, comptes-tu profiter de ta retraite pour t’offrir une deuxième carrière dans ce monde d’encre, de pixels et de papier ?

C’est arrivé par surprise ! Lorsque j’ai envoyé mon recueil de 30 nouvelles (éreintant, vous dis-je) à mon éditrice, il n’y avait plus de direction pour cette collection. En lisant mes textes, elle m’a appelée pour me proposer le job, séduite par mon recueil qui devrait paraître en juin si tout va bien. J’ai dit oui sans hésiter. C’est un travail hyper gratifiant, très chronophage, mais j’en suis vraiment très fière. Je reçois des manuscrits (d’ailleurs, si vous en avez dans vos tiroirs, pensez à moi) et je m’efforce toujours d’argumenter quand je refuse le texte. Je sais ce que c’est que de passer des heures à écrire alors recevoir un mail du genre « nous ne retenons pas votre texte » sans explications, c’est d’un mépris total pour l’auteur (petit coucou à David). J’ai la notion de respect dans le sang, et cela fait partie de ma façon de travailler.
Et comme je le souligne plus haut, je bénéficie à présent d’un luxe énorme : j’ai tout mon temps ! Paradoxalement, je ne vois plus le jour et la nuit, mais j’adore ça. J’aime être débordée.

  • 5. Je t’ai pas mal observé sur Twitter depuis que j’y suis. J’ai remarqué que tu étais toujours prompte à aider, à donner des conseils, à te proposer pour des bêta lectures… Dans la même veine, aurais-tu des conseils à filer à tous les petits auteurs qui débutent dans le grand bain de l’autoédition et de l’édition tout court ?

D’abord, il n’y a pas de petits auteurs. Il y a des auteurs qui ont de la bouteille, des auteurs effrontés, des auteurs timides, des auteurs qu’osent pas, mais qui le font quand même, des auteurs qui foncent et qui se prennent un mur, des auteurs qui tremblent de peur mais qui la surmontent, des auteurs qui ne savent même pas qu’ils sont auteurs, des auteurs qui friment, des auteurs humbles, des auteurs imbus, des auteurs savants pas pédants, des auteurs qui cherchent à comprendre, des auteurs qui pleurent, des auteurs qui rient, des auteurs qui aiment, des auteurs qui dénoncent, des auteurs qui ont eu de la chance, des auteurs qui ont la rage, des auteurs qui ont des rages de dents, des auteurs ailés, des auteurs zélés, des auteurs déçus, des auteurs au pinacle, des auteurs qui lampent le verre à moitié vide, des auteurs qui goutent au verre à moitié rempli… bref, un monde quoi.

Il faut donc donner des conseils à tout cet univers ? Je m’avance à donner ceux-là, mais je n’affirme rien. C’est juste ma façon à moi et je ne sais pas si elle vaut quelque chose (après tout, Spielberg ne m’a toujours pas contactée pour mettre en film ma saga Thuata, chose que réclament haut et fort certains de mon lectorat, si, si) : écrire, tous les jours, quelle que soit la durée, peu importe. Prendre du plaisir à le faire, surtout. Laisser reposer le texte pendant un certain temps (il m’arrive d’attendre plus de 6 mois pour le faire). Le reprendre, le corriger, le corriger, le corriger. Le re-corriger et arrêter de corriger. Et puis s’il doit aller vers l’AE : se tourner vers tous ceux qui l’ont fait avant et qui savent comment faire (il y a tout plein de groupes sur les RS pour cela) et si c’est pour une ME, bien repérer la ligne éditoriale (si c’est de l’érotique, coucou je suis là) et présenter un texte tel que le demande la ME et surtout avec le moins de fautes possible. Un texte très mal orthographié ira directement à la poubelle dans les grandes ME et passera difficilement le cap dans les plus petites.

Maritza

  • 6. On parle souvent d’écriture, d’inspiration, mais finalement, qui es-tu ? Révèle-nous un secret bien gardé, une anecdote sur toi ?

Haha… un secret bien gardé. Un soir, j’ai fait pipi dans ma culotte tant j’étais morte de rire. Ça va comme secret ? Non. Bon. Un jour, je devais avoir 4 ou 5 ans, j’ai arraché les ailes d’une mouche. Je ne m’en suis jamais remise. La preuve, des décennies plus tard, je m’en souviens encore. Quand on est môme, parfois, on fait de ces trucs… et encore je ne vous dis pas tout. Si vous saviez…

  • 7. Dans Thuataaaaaaa, on se promène entre l’Écosse et Paris, dans le Cuir et la Plume, on s’enfonce dans les ruelles parisiennes ET on farfouille sur Ecosia le perrier rondelle. Pourquoi un tel choix ?

Ben, c’est mieux que le Perrier carré, non ? Ailleurs, on dit un Perrier citron, à Paris, c’est la rondelle. C’est comme ça, cherchez pas à savoir pourquoi et touchez pas à Paris ! Je suis née à Paris. J’ai travaillé à Paris, je suis amoureuse de ma capitale et je ne me lasserai jamais de m’en servir pour le décor de mes romans. C’est la plus belle ville du monde, point barre, dis-je en toute subjectivité assumée, et puis il y a tout plein de surprises avec Paris.

En faisant des recherches pour la saison 3 de Thuata (il sera question de Mozart, de légendes nordiques et de franc-maçonnerie), je suis tombée sur le nom d’une rue qui a attiré mon attention : la rue du Pélican. L’origine de ce nom est à mourir de rire : elle s’appelait auparavant « poil au con » en rapport avec des dames de « petites » vertus qui exerçaient dans cette rue… Voyez l’allusion ? Forcément, j’ai savouré cette information que je me suis empressée d’utiliser. Bref. Paris for ever.

  • 8. Il existe un genre littéraire que tu n’utilises pas malgré toutes les cordes de ton arc : le fantasy. On a le voodoo, le policier, l’érotisme, le fantastique, l’aventure, la romance… mais est-ce que la Fantasy ne t’attire pas ? Un défi que tu n’aimerais pas relever ?

Alors, si vous voulez me donner un moyen pour me planter lamentablement, celui-ci en un beau ! Je suis nulle, archi-nulle, crassement nulle dans ce genre. Ce serait une vraie torture que de me lancer dans cette aventure, je la laisse volontiers à tous ceux qui y excellent (ou pas). Et dois-je l’avouer ? Je n’en lis pas beaucoup (pas taper). Et non, je ne relèverai jamais le défi, je ne suis pas maso.

  • 9. Bien que se mettant dans de beaux draps (jeu de mots fait exprès), tes héroïnes sont souvent fortes et savent ce qu’elles veulent. Quels sont les thèmes abordés dans tes ouvrages, pourquoi ils te tiennent à cœur ?

Au risque de paraître basique : l’égalité femme/homme (j’en vois au fond de la salle qui grincent des dents, je précise que je ne suis pas extrémiste, mes seins ne sont pas des armes révolutionnaires, quoique, vive les seins libres…), le droit d’aimer comme on veut et qui on veut, dès lors qu’il y a consentement bien sûr (dehors les culs bénis, les hypocrites mal baisés, les bigots rances, les pères la morale), le respect de soi, de l’autre, des autres, de notre planète. Ah et puis aussi un peu la dérision, l’humour, le sexe, parce que bon, je deviens trop sérieuse là. Ça m’énerve.

  • 10. L’édition, c’est fait. Que penses-tu de l’autoédition ?

Que du bien ! Je ne m’exclus pas du tout cette possibilité, ce serait crétin et absurde. Nous avons la chance d’avoir tous les outils pour nous éditer, sans parler de l’aide des auteurs qui nous l’offrent avec bienveillance et générosité. Faut juste que je trouve le temps de m’y pencher sérieusement.


Je trouve imbécile cette idée de dénigrer l’autoédition, sous prétexte que si le livre n’est pas passé dans le circuit « normal » de l’édition, il serait de moindre qualité littéraire. C’est une idée archaïque. Les deux se valent, les deux pourraient s’entraider au lieu de s’entretuer.
Plus il y a de livres, mieux on se porte ! Il faut lire et n’oubliez pas le marktapage.

Encore Merci à Maritza et Frédéric ! Félicitation Jeanne et merci pour cette sublime Interview qui tue ! 

H

 

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